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Arrived Somewhere
23 avril 2016

Andy Jackson -73 Days At Sea - 2016

andy

Après « Signal to Noise » en 2014, Andy Jackson est de retour avec l'atmosphérique « 73 Days At Sea ». Ingénieur du son de Pink Floyd depuis « A Momentary Lapse Of Reason » en 1987,travaillant également sur les projets solo de Waters et Gilmour, Andy Jackson porte indéniablement dans ses compositions le son du Floyd. Ce disque,comme le précédent ,est donc imprégné d'un son qui sera familier à beaucoup d'entre nous. Mais ne cédons pas à la tentation de crier à la copie ou au manque d'originalité. Effectivement , le jeu de guitare est parfois gilmourien, les claviers spatiaux ont la texture de ceux de Rick Wright,le chant peut évoquer Waters ou Gilmour et quelques mélodies peuvent nous replonger en territoire connu. Cependant, cet album possède une vraie personnalité qui s'affirme au fil des écoutes et à mesure que la tentation de la comparaison s'étiole.

La traversée est fluide,ininterrompue.On plane dans des brumes troubles,on glisse au-dessus des eaux étincelantes ou l'on plonge dans des flots écumeux pour rejoindre les grands fonds.

Hypnotiques et planants,ces 73 jours en mer introspectifs ne manquent pas de relief, grâce notamment à une basse langoureuse très affirmée, sorte de fil conducteur au cœur d'un périple en solitaire parfois oppressant,mais ou la lumière bienfaisante sait retrouver son chemin.

 

L'album débute sur un fond sonore de vagues,laissant libre cours à la mélodie simple de « Like You ». La voix,tout en réverbération, dessine l'immensité  qui nous fait face. La mélodie donne l'impression d'un envol,avec ses longues notes tenues. Nous nous trouvons sur la côte,au bord du monde,près à quitter la terre ferme. Se réfugier en mer,c'est se mettre en marge du monde et échapper au réel. C'est aussi voyager en soi,dans sa mémoire,ses rêves , son inconscient et ses pensées les plus personnelles. Voici en quelques mots l'essence du voyage qui nous sera conté au fil de ces 49 minutes.

La basse entre déjà en scène, envoûtante,associée à une guitare brillante et de beaux élans de clavier. Transition sonnant comme un départ, « Ships of dreams »,avec ses arpèges légers et volatiles de guitare flottant au souffle du vent ,évoque la distance et l'éloignement.

Suivent quatre courts morceaux qui s'articulent à merveille, formant comme différents territoires d'un même archipel. Nous visitons tour à tour ces différentes îles,projections de différents états d'esprit :

Le Gilmourien « Type 2 error » ,histoire d'un naufrage ,conté sur un ton détaché,comme se riant de la fatalité,à l'image de ces notes de guitare acoustique à l'aspect plutôt optimistes, accompagnées d'une guitare électrique plaintive,la tout tapissé de l'onirisme rendu par le clavier.

Le stratosphérique « Balooning »,bouffée d'air pur, qui ravit par ses superbes sons de clavier évoquant des voix et cette guitare qui nous inviterait presque à fredonner quelques notes du monument floydien « Echoes » .

« Type 1 Error » et son illusion de nostalgie, au rythme berçant ,au clavier ondulant ,mêlant douceur folk et sons évaporés.

Le très bref « Lighthouse »,qui nous guide, minuscules dans l'immensité sombre, nous enfonçant plus profondément dans les brumes de l'introspection.

Nous voici aux portes des trois pièces maîtresses de l'album. Tout d'abord, « Legends of Mysterious Apes » possède un charme fou, entre tourments de solitude et sursauts psychédéliques. L'instrumentation est d'abord très modeste ,laissant place aux voix aux résonances multiples et à la guitare sereine.Soudain on entrevoit le merveilleux,après un cortège de sons déchirants et étranges,la guitare flamboie,les claviers irradient. L'éblouissement est aussi vif qu'éphémère,comme un mirage, une vision puissante,un délire de marin ayant perdu ses repères,si ce n'est la raison.

L'ivresse des profondeurs nous gagne. « Gyre » nous possède avec une douceur spectrale,tout comme la voix qui résonne amplement. Le son nous happe. C'est un tourbillon qui appproche , nous attire par le fond et relâche son étreinte.La pression enserre à mesure que nous sombrons dans les abysses. Les sons se font irréels,la voix,débordante de réverbération prend un aspect inhumain ,déformé et désincarné. La guitare aussi prend différents visages,de sons simples et purs en sons torturés. La réalité est ici perçue dans des miroirs déformants. On remonte en surface brutalement pour chercher l'oxygène avec l'entrée en scène dramatique du saxophone de David Jackson, semblant pousser des cris désespérés,alors que la basse enfle tragiquement en absorbant et en réinjectant une énergie prodigieuse. L'épique « Drownings » va ainsi nous captiver durant 17 minutes.La voix masculine narratrice assène sa triste mélopée avant que la guitare ne s'offre un beau monologue soutenu par la basse omniprésente et nous tenant en haleine. Le rythme ralentit et la voix d'Anne-Marie Helder fait son apparition,fragile ,comme à bout de souffle,sur un tissu de claviers éthérés. Témoignage d'une existence malheureuse au royaume de la solitude,le chant se perd soudain dans un gouffre. L'ambiance, qui se fait oppressante, redonne naissance à la rythmique hypnotique et aux tragiques poussées de saxophone.La voix masculine apparaît froide et inquiétante ,métallique, saturée d'effets au rendu maléfique. Le morceau s'étire et installe son atmosphère,pose sa narration,entre fièvre et lucidité. En conclusion, la guitare inspirée semble vouloir contredire et dépasser le pessimisme ambiant. Mais les deux voix réunies expriment un trop lourd regret et la fatalité de leur échec.

Intensément réconfortant « Black Sailed Unfamiliar » est une conclusion soyeuse . C'est le calme plat,le règne de l'immensité azurée,de l'océan purificateur.Les sonorités cajoleuses ne recèlent qu'harmonie.

Andy Jackson a crée avec cet album des tableaux sonores subtils et captivants. Il a réalisé une belle allégorie,où celui qui embarque avec confiance pour ces 73 jours en mer sera transporté sur une mer sublimée,floue,irréelle,métaphore d'un monde qui peut s'avérer aussi dévorant que resplendissant.

 

Andy Jackson - 73 days at sea (Sampler)

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