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Arrived Somewhere
15 mars 2016

Dead Can Dance -The Serpent's Egg - 1987

serpent

S'éloignant de la pénombre et élargissant son horizon, Dead Can Dance poursuit son évolution avec The Serpent's Egg, en incorporant de nouveaux éléments à ses compositions et en expérimentant dans des voies encore inexplorées. Le romantisme sombre des deux albums précédents s'illumine et le groupe ajoute des couleurs à sa palette. Les influences médiévales côtoient alors les compositions aux accents orientaux et invitent les percussions tribales à la fête, percussions qui auront leurs lettres de noblesse sur Into The Labyrinth et Spiritchaser. Sous des atours à priori simples et épurés, The Serpent's Egg se révèle puissamment envoûtant . La voix y est reine. Celle de Lisa ,d'une maîtrise inouïe et d'une irréelle essence et celle de Brendan ,dramatique et emplissant l'espace pour mieux conquérir nos esprits. Les morceaux, aux constructions volontairement répétitives,installent des ambiances méditatives qui enrobe l'esprit dans un manteau d'irrépressible quiétude. Brendan et Lisa ,gardiens de nos âmes captivées,capturées de façon bienveillante,excellent à nouveau dans l'art de répandre leur magie.

Sur The Host Of Seraphin,la prestation vocale de Lisa semble repousser les limites des capacités du commun des mortels. Sa voix, libérée de toute entrave,navigue partout où bon lui semble. Naturellement, des images surgissent devant nos yeux. Ces images élèvent l'humanité au rang du sacré. On peut ressentir les vibrations d'une humanité précieuse. Ainsi, par-delà la musique,s'étendent majestueusement des tableaux de beauté puissante ,de désolation,de bonheur et de désœuvrement , de force et d'abattement,visuels évocateurs qui laissent comprendre pourquoi ce morceau sera utilisé dans plusieurs films,notamment Baraka en 1992, documentaire sur l'humanité et ses aspects spirituels ou destructeurs.

Le magnétisme de ce morceau a préparé l'auditeur qui ne peut que se laisser capturer par Orbis De Ignis, morceau dépouillé,où seule une cloche intervenant de façon sporadique accompagne deux voix qui s'entremêlent : un choeur d'hommes monodique d'aspect grégorien et une voix féminine,toutes deux s'exprimant dans un style syllabique et uniforme. Dépassant l'austérité d'une telle approche, on peut penser que l'effet voulu est celui d'une musique purifiée, parfaite mise en condition pour se laisser bercer, puis ensorceler.

Severance emporte l'auditeur grâce à la poignante performance vocale de Brendan ,où puissance et fragilité se mêlent. La voix semble parfois se briser pour redevenir aussitôt claire et profonde. Dans sa seconde partie ,le morceau irradie d'une auguste mélodie de vielle à roue ,imposant une sonorité singulière et vibrante. Sur cette mélodie finale glisse un chuchotement ,souffle frémissant...

The Writing on my father's hand ouvre les portes d'un monde de sorcellerie. Au royaume de l'étrange, au rythme lent d'un clavecin itératif,Lisa dissémine ses incantations et fait danser les ombres. Elles se multiplient,puis s'évanouissent.

C'est un autre ensorceleur qui vient poser ses incantations et injecter ses sorts avec In the Kingdom Of The Blind The One-eyed Are King. Brendan devient le gourou ,capable de sa voix insistante,de son timbre appuyé d'ouvrir de nouvelles perspectives. Emporté par la vague émotionnelle qui enfle démesurément ,notre esprit est sous contrôle. L'incantateur,créateur d'hallucinations,disparaît soudain dans une pirouette,laissant derrière lui des volutes de mystère.

Engourdi,l'esprit replonge dans les flots tournoyants de Chant Of The Paladin,où les voix, aux accents folkloriques d'Asie Centrale,évoluent lentement au rythme des grelots et du timpani.

Une note tenue de vielle teinte cette performance spiralaire d'un caractère moyen-âgeux et participe à son aspect chamanique. Encerclés,notre monde perceptible nous échappe et nous cédons irrésistiblement à l'appel de l'inconscience.

Complainte très courte chantée par Lisa, Song of Sophia opère la transition vers deux morceaux qui prendront une couleur plus chaude. Ces vocalises arabisantes projetées avec tristesse précèdent Echolalia. A la croisée d'influences africaines et de chants traditionnels bulgares,ce morceau brille par l'effervescence de voix vibrantes et diaphoniques. Puis Mother Tongue entame une joyeuse libération de percussions,rapides et chaloupées. Ceci marque le début de l'intense expérimentation rythmique qui fera des albums suivants des mines de richesses percussives. Le rythme brusquement ralenti installe une ambiance secrète. Le bruisssement de l'eau nous transporte au cœur d'un jardin oriental,au pays des mille et une nuits. Scintillement des grelots,fantomatique apparition de clavier,intrusion d'une mélodie psalmodique ,oeuvre de Lisa,nous errons dans une nuit peuplée de senteurs et de bruits à la fois étranges et caressants.

Brusquement soulevés,nous voilà emportés dans le tourbillon d'Ulysses,au rythme d'un clavecin évanescent. Cette valse aux allures de joyeux bal démoniaque ou de carnaval médiéval nous happe dans un monde insaisissable. Le tournoiement nous laisse entrevoir les couleurs d'une parade mouvante où de magnifiques salves de violon nous saisissent puissamment. Prodigieuse odyssée,jusqu'à la dernière note.

The Serpent' s Egg agit comme un sortilège. Tenu en haleine,l'auditeur boit le filtre délicatement offert, plonge sereinement dans d'harmonieux tunnels sonores et progresse jusqu'à accéder à de nouvelles perceptions. Au détour d'un rite chamanique,d'une messe vaudou ou de l'enchantement d'une féerie médiévale ou orientale,il ne peut résister à une telle manipulation par la musique, procurant un apaisement intense. Si vous pensez que ce disque pêche par son aspect épuré,vous ne pourrez nier les bienfaits qu'il procurera à l'esprit qui acceptera d'entrer dans ce monde.

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Commentaires
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Merci beaucoup pour ce message ! Cela fait plaisir quand des lecteurs prennent le temps de laisser un message ;) Mes préférés sont Spleen and Ideal et Within The Realm.. mais celui-ci est magnifique également
B
Bonjour! Je viens de tomber par hasard sur votre blog et je l'aime beaucoup!<br /> <br /> Votre chronique sur "The Serpent's Egg" est excellente et j'adore cet album qui fait parti de mes préférés de Dead Can Dance! <br /> <br /> <br /> <br /> Bonne soirée à vous
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